Un entretien avec Karl Lagerfeld pour Air France Magazine est un exercice d'équilibriste. Il a le don de dévier le fil de la conversation d'un (bon) mot, de digresser sans cesse, de déconcerter son auditoire par des plaisanteries auxquelles il rit lui aussi. Un exercice de répartie, les siennes étant si lestes que l'on a intérêt à aiguiser sa langue et son esprit ; un exercice de cache cache , enfin car il n'est jamais là où on le cherche. On a beau faire le malin, le créateur le plus célèbre de la planête mode voit la manœuvre, esquive et s'en amuse. Les mots sont un rempart pour cet aristocrate né en Allemagne, devenu Français avec Chanel et Italien avec Fendi, dont il dessine la mode depuis respectivement vingt-trois et quarante et un ans. Mais le temps n'a pas de prise sur ce pape de l'éphémère. Quoiqu'on pense de l'homme au catogan enfariné, on ne peut qu'appaudir la constance de sa créativité. Couturier, photographe, éditeur, collectionneur (il préfère dire accumulateur), pas une minute ne s'écoule sans une nouvelle idée, comme celle de dessiner des tenues inédites pour nos hôtesses de l'air, qu'il imagine en jeans bleus siglés Air France. Il nous reçoit à la Lagerfeld Gallery, au beau milieu des essayages de sa prochaine collection personnelle . Anita sa première main depuis 1965, lui présente des retouches…
© autoportraits Karl Lagerfeld